Onze ateliers spécialisés s’attèlent à la dernière étape de mise en marché des Comté : leur découpe et leur conditionnement en portions ou en râpé. Toutes ces structures, intégrées à des maisons d’affinage ou totalement indépendantes, sont obligatoirement situées dans la zone d’appellation.

C’est le quatrième et dernier maillon de la chaîne humaine du Comté : la découpe des meules et leur conditionnement pour la vente, en portions ou en râpé, sous emballage.
Le Comté découpé ou râpé est essentiellement destiné au marché de la grande distribution (GMS) et dans une plus petite mesure aux grossistes, aux commerces traditionnels, à la restauration hors foyer (bars, restaurants, cantines) et à l’export (en petites quantités dans quatre-vingts pays).

Le conditionnement, né de l’essor des grandes surfaces

Dès les années 70, les entreprises d’affinage, chargées de cette découpe, ont mis en place les conditions industrielles afin de répondre au marché naissant de la grande distribution. Dans leur livre Sur les traces du Comté, Jean-Pierre et Michel Gurtner reproduisent un écrit des Dépêches (Le Progrès d’alors) datant de juin 1970 : « (…) Un nouveau marché tend à se créer de plus en plus, celui des magasins à grande surface. (…) Les supermarchés imposent de nouvelles orientations à la production. Il faut donc trouver l’équilibre entre le développement d’une production traditionnelle, qui doit rester une production de qualité (…) et la nécessité de s’adapter aux impératifs d’une distribution hautement industrialisée. Comme en toute chose, le juste milieu doit être respecté ». L’année suivante, le CIGC institue un classement technique des fromages, basé sur des critères physico-chimiques et organoleptiques précis, pour s’assurer d’une qualité constante et préservée. En 1992, les hyper, super et supérettes commercialisaient 75 % des Comté. Actuellement, la grande distribution française écoule 65 % du Comté vendu en France.

L’interprofession, vigilante lors de toutes les étapes

Le Comté est proposé à la vente en meules entières, en parts de meules, en portions (aussi appelées plaquettes) ou en râpé depuis 2007. Il existe d’autres conditionnements, plus rares, en dés, en tranchettes, en allumettes ou en barres. Les magasins, qui achètent des meules entières ou parts de meules, peuvent opérer ensuite une « fraîche découpe » sur place, mais qui répond à des règles précises de conservation et de maintien de la qualité du fromage : les portions, mises sous emballage immédiatement après la découpe, doivent être écoulées le jour de la coupe ou dans les deux jours ouvrés suivants. Y compris dans cette dernière étape du conditionnement, le cahier des charges de la filière dicte sa loi, comme un précieux garant, jusqu’au bout, de la qualité du Comté AOP.

Les règles d’étiquetage

Qu’il s’agisse d’un sachet de râpé ou d’une portion pré-emballée, le cahier des charges impose des règles d’étiquetage destinées à assurer la cohérence et le respect de l’image du Comté, ainsi que l’information transparente au consommateur.
Extraits du cahier des charges :
> Sur tous les types de conditionnement du Comté, sont obligatoires, au recto, le logo « Comté clochette verte » et la désignation « Comté » en caractères de dimensions au moins égales aux deux tiers de celles des caractères les plus grands, avec le code couleur vert Pantone 349C.
> L’étiquetage doit comporter le symbole AOP de l’Union européenne.
> Le fabricant, l’affineur ou le préemballeur est tenu d’apposer en clair son nom et adresse, située obligatoirement dans l’aire de production du Comté.

Des contrôles réguliers sur le goût

Tout comme le Comté vendu en meules, le Comté commercialisé en portions préemballées ou sous forme de râpé, est régulièrement contrôlé. Des échantillons sont prélevés dans les entreprises, analysés et dégustés anonymement par la Commission d’Examens Organoleptiques (CEO). Cette « CEO » vérifie que le produit répond aux exigences de l’appellation et porte une attention très particulière au goût du Comté râpé. Celui-ci ressemble visuellement à tous les râpés, et doit obligatoirement se démarquer en termes de goût. Les juges de la CEO y sont particulièrement attentifs.

Découpe et conditionnement : dans le massif du Jura obligatoirement

Le Comté est l’une des rares AOP à exiger que la découpe et le conditionnement du fromage soient réalisés par des ateliers exclusivement implantés dans sa zone d’appellation.
Les onze entreprises spécialisés dans le préemballage du Comté sont situées dans la zone d’appellation. Ici à Avoudrey, chez les Affineurs Réunis (Petite, Rivoire-Jacquemin et Vagne)

C’est obligatoire et expressément stipulé dans le cahier des charges du Comté : « la production de lait, la fabrication et l’affinage des fromages, ainsi que le tranchage et le râpage, uniquement dans le cas du préemballage, sont effectués dans l’aire géographique d’appellation ». Pourquoi ?
Pour garantir l’authenticité, la qualité et la traçabilité du Comté. « Les fromages une fois tranchés et encore plus râpés se ressemblent tous. Le fait d’avoir des lignes dédiées au Comté et à portée de contrôleurs nous assure que ce sont bien des tranches ou des morceaux de Comté qui sont mis sous films et que la qualité de ce fromage est maitrisée par des professionnels de la filière », précise Denise Renard, directrice adjointe du CIGC. Pour l’organisme de défense et de gestion du Comté, assurer de façon régulière un contrôle qualité chez tous les opérateurs habilités est plus facile dans ce contexte que si tous étaient éparpillés à travers le monde.
Cette mesure, dont la vocation est la préservation de la qualité du produit, a pour autre conséquence le maintien de l’emploi sur le territoire. Environ 300 salariés, au sein de onze ateliers spécialisés du massif jurassien, conditionnent le Comté.

Le râpé, cadet de la famille Comté

C’est le dernier né de la filière, répondant à un souhait des consommateurs : facilité et rapidité d’utilisation, tout en conservant le goût typique du Comté.

Depuis son autorisation en 2007, le Comté râpé constitue une petite part des ventes globales (6,8 % en 2021), en augmentation linéaire depuis trois ans. Le râpé est du Comté à part entière : il a obtenu son appellation avec une note minimale de 14/20. Il permet notamment de valoriser les chutes de découpe des meules bandes vertes destinées à la coupe.

Traçabilité et suivi qualité

Avant d’être râpé, le Comté est écroûté, découpé en longes puis en cubes, qui montent ensuite vers la « râpeuse » avant de glisser vers un répartiteur, qui envoie le râpé par force centrifuge vers des bacs peseurs associatifs. Ceux-ci se chargent de relâcher la quantité nécessaire au poids d’un sachet. La bobine de film de l’ensacheuse se déroule alors verticalement et le Comté râpé glisse dans le plastique soudé au bas pour créer un tube. Un gaz neutre de conservation, à base de CO2 et d’azote, est injecté pour remplacer l’oxygène et ainsi augmenter son temps de conservation, et le haut du paquet est soudé. Ensuite, le contrôle qualité intervient avec un détecteur de métaux, le contrôle du poids, de la quantité de gaz, puis un dernier contrôle visuel humain des soudures est réalisé avant la mise en cartons. Par ailleurs, à chaque étape (écroutage, râpage), la traçabilité des meules est assurée. Des opérations de nettoyage régulières ont lieu dans la journée pour décoller le fromage qui se serait aggloméré sur le répartiteur, puisque le cahier des charges du Comté interdit les antiagglomérants (antimottants).
Si certains conditionnements « originaux » existent, la plupart des sachets de râpé sont des « flowpack », système d’ensachage classique. Le Comté n’utilise pas, comme c’est le cas pour le Parmesan par exemple, des « doypack », ces sachets à soufflets de fond qui leur permettent de tenir debout. Christophe Lefevre, directeur du site Ermitage de Guyans-Durnes, explique ce choix : « Le client cherche une qualité de produit, un goût. Le packaging en Comté est important, mais l’essentiel, c’est ce qu’on met dedans. »
En fonction des types de clientèle, le râpé est conditionné en sachets de 130 g à 1 kg (ce dernier étant davantage destiné à la restauration hors foyer).

Le Comté, par force centrifuge, glisse dans des bacs peseurs qui relâchent la bonne quantité de râpé dans une ensacheuse verticale. Ici chez Ermitage à Guyans-Durnes.
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